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Charlotte Charpot, le blog de l'auteur.
22 septembre 2009

Dans le Télémoustique de ce mercredi 23 septembre 2009

         

Prof, mission impossible

Dossier enseignement

Actu-Société

Est-ce la guerre entre élèves et professeurs? Nous avons vérifié sur le terrain, dans la foulée de Madame, vous êtes une prof de merde!, devenu culte dans les salles de profs.

Les élèves savent bien qu'ils n'ont pas un niveau exceptionnel. Ça ne sert à rien de leur faire sentir.

Le monde de l'enseignement est entré en ébullition. A peine sortis de l'été, les profs ont appris par la presse les intentions de leur ministre de tutelle: les faire travailler plus et plus longtemps pour le même salaire. Se sentant déjà malmenés et mal considérés, ils s'insurgent de pâtir en premier des difficultés budgétaires de la Communauté française. Ce regain de malaise coïncide avec la parution, très médiatisée en France, du livre Madame, vous êtes une prof de merde!, signé Charlotte Charpot. Sous ce pseudo se cache une ancienne enseignante française de 28 ans qui témoigne de son calvaire dans le milieu scolaire, en France puis en Belgique. Parachutée d'année en année dans les pires établissements, la jeune femme a vécu dans la terreur, dit-elle. Ses bourreaux? Ses élèves. Son salut? Quitter la profession (fin 2008). Le pire? L'indifférence des directions.

C'est pour briser ce silence que Charlotte Charpot a choisi de prendre la plume. Sorti en Belgique en juin dernier, son livre s'est déjà vendu à près de 8.800 exemplaires. Un titre coup de poing et une campagne médiatique rondement menée ne sont sans doute pas étrangers au succès de ce livre. Le sentiment de détresse ou de colère aujourd'hui ressenti par de nombreux enseignants non plus. Le livre a aussi attiré l'attention des autorités politiques. Charlotte Charpot a d'ailleurs été reçue par la ministre de l'Enseignement francophone, Marie-Dominique Simonet. La jeune Française s'est ainsi retrouvée porte-parole des enseignants belges.

Parmi ceux-ci, beaucoup se plaignent de la difficulté d'exercer leur métier aujourd'hui, surtout dans les établissements à "encadrement différencié", appelés jusqu'il y a peu "écoles en discrimination positive", qui bénéficient de moyens supplémentaires en raison des caractéristiques socioéconomiques des quartiers dont les élèves sont issus. Des écoles ghettos où enseigner relève parfois de l'exploit. Où certains profs renoncent à écrire au tableau par crainte des projectiles, essuient les insultes et parfois les agressions physiques de la part d'élèves ou de leurs parents. Mais cette violence touche aussi les écoles huppées où elle se fait plus sournoise. "Les élèves me toisent ou m'ignorent totalement quand je pose une question", explique Fabian, prof de sciences dans un établissement renommé du sud de la capitale.

Génération Titeuf

Le métier serait-il plus difficile qu'avant? Les jeunes d'aujourd'hui seraient-ils plus pénibles que par le passé? "Quand je suis entré dans l'enseignement, il y a vingt ans, j'ai déjà dû remplacer des collègues qui étaient en dépression, explique Marc, 54 ans, prof de religion dans une école secondaire technique du Brabant wallon. Des élèves crachaient au visage d'un de mes collègues, en souriant." A chaque époque, les ados en ont fait voir de toutes les couleurs à leurs aînés, parents et professeurs. N'empêche, depuis les années 80, des éléments ont profondément bousculé la société: augmentation du nombre d'élèves d'origine étrangère ne maîtrisant pas le français, arrivée des jeux vidéo, du GSM, d'Internet. "Les jeunes disposent aujourd'hui de loisirs illimités, sans même sortir de chez eux, sans ouvrir un bouquin, explique cette mère d'une adolescente de 15 ans. En tant que parents, on n'a plus de prise sur leur univers."

Nageant dans l'abondance de loisirs, de moyens de connaissance et de communication à l'extérieur de l'école, beaucoup de jeunes s'ennuient en classe et le font savoir. "Certains enseignants, plus âgés, rêvent encore de l'époque du Petit Nicolas, alors que nous sommes dans la génération Titeuf", explique Philippe Béague, psychologue et psychanalyste, président de la Fondation Dolto et auteur de Parents, enseignants, la guerre ouverte.Les jeunes d'aujourd'hui se calquent sur ce qu'ils entendent autour d'eux, à la télé comme dans la bouche de leurs parents. "Sans être acceptable, l'expression "prof de merde" n'est aujourd'hui plus considérée comme un sacrilège aux yeux de certains gamins." Mais Philippe Béague constate surtout un changement dans l'attitude des parents: "Beaucoup vouent aujourd'hui une sorte de passion à leur enfant. Ils compensent parce qu'ils travaillent beaucoup, parce qu'ils sont séparés, imposent un beau-père ou une demi-sour."

[...]

Vrais "profs de merde"

Si de nombreux enseignants pourtant motivés subissent indifférence ou agressivité, d'autres abusent sans complexe de leur autorité. Oui, les vrais "profs de merde" existent aussi. Comme cet enseignant de Hoegaarden qui, en mai dernier, a plongé la tête d'un élève dans un seau de ciment. Les images ont circulé sur le Net et dans les médias, une enquête a ensuite été ouverte. Les dérapages des enseignants sont parfois plus perfides et touchent tous les milieux scolaires. "Chaque fois qu'on arrive au cours de math, c'est l'enfer, témoigne Benjamin, en troisième secondaire générale. La prof peut nous laisser toute l'heure au tableau, en hurlant jusqu'à ce qu'on termine l'exercice. Quand on rate une interro, elle nous traite de gros sacs de pommes de terre." Bien que plus policée, l'expression peut valoir "élève de merde".

Pour sa part, Aurélie, 16 ans, a subi les foudres de sa prof de néerlandais. "Elle avait une vraie dent contre moi parce que je dessinais souvent pendant son cours. Elle m'a busée pour un point en fin d'année, alors que j'avais beaucoup étudié. J'ai doublé à cause de ça." Depuis l'instauration des recours en 1997, les parents ou élèves majeurs peuvent officiellement contester un échec qu'ils jugeraient arbitraire. "Mais cette mesure nuit totalement à notre crédibilité", estime Françoise, prof de français.

Puis, il y a ces enseignants qui se chargent eux-mêmes de détruire leur réputation. "J'avais un prof qui buvait, se souvient François, 20 ans. Un jour, il s'est pris la tête avec un élève. Ils se sont empoignés. Le prof était un ami du proviseur. C'est l'élève qui a été viré." Ces enseignants qui nuisent à l'image de la profession, Sylvie en connaît aussi parmi ses collègues. Comme ceux qui ont du mal à garder leurs distances avec les élèves. "Certains racontent en classe des détails de leur vie privée, rapporte Sylvie. D'autres commettent des fautes d'orthographe indescriptibles. Quand ils n'enseignent pas des théories créationnistes. C'est intolérable et dangereux!"

[...]

Anne-Cécile Huwart

La suite dans votre TéléMoustique

http://www.telemoustique.be/tm/magazine/8463/prof-mission-impossible.html

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